Le forfait jours est un système de décompte du temps de travail selon le nombre de jours annuels travaillés plutôt que selon les heures. Ce dispositif, encadré par la législation française, donne une grande autonomie aux cadres, notamment, dans la gestion de leur temps de travail, mais il pousse à revoir toute la gestion de ces ressources humaines, de leur rémunération à leurs temps d'activité.
Les bases du forfait jours
Le forfait jours est une modalité particulière de décompte du temps de travail, qui s'applique particulièrement aux cadres qui ont besoin d'une plus grande autonomie qu'un salarié non cadre. Contrairement au système traditionnel basé sur un décompte horaire, ce dispositif permet de calculer le temps de travail en nombre de jours sur l'année. Dans ce cadre, le salarié n'est plus soumis aux 35 heures hebdomadaires mais travaille selon un nombre de jours défini annuellement. La législation française fixe une limite maximale de 218 jours travaillés par an, bien que des accords collectifs puissent prévoir un plafond inférieur.
Ce système permet aux cadres de s'affranchir des contraintes horaires quotidiennes pour accomplir leurs obligations professionnelles. Le décompte se fait en jours ou demi-journées, ce qui transforme profondément la relation au temps de travail.
Un statut encadré par la convention de forfait en jours
La mise en place d'un forfait jours nécessite obligatoirement une convention individuelle écrite. Ce document formalise l'accord entre l'employeur et le salarié concernant cette organisation particulière du temps de travail. La convention doit préciser notamment :
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Le nombre de jours travaillés dans l'année ;
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Les modalités de décompte des jours travaillés et de prise des repos ;
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Les conditions de suivi de la charge de travail.
Pour être valide, cette convention doit respecter plusieurs conditions établies par le Code du travail.
Les prérequis à la mise en place d'une convention de forfait jours
La première condition de validité de la convention concerne l'existence d'un accord collectif préalable. Selon l'article L3121-63 du Code du travail, un accord d'entreprise, d'établissement ou de branche peut instituer la mise en place du forfait jours. Cet accord doit définir les catégories de salariés concernés, la période de référence du forfait, et le nombre de jours travaillés dans l'année.
L'accord collectif doit également prévoir des dispositions garantissant le respect des durées maximales de travail et des temps de repos. Il est notamment question de définir les modalités de suivi de la charge de travail, des entretiens périodiques, et des mesures de déconnexion.
L'accord individuel du salarié et les mentions obligatoires
Le salarié doit donner son accord explicite à la convention individuelle de forfait jours. Celle-ci doit mentionner le nombre de jours travaillés sur l'année, qui ne peut excéder 218 jours sauf dispositions particulières. Pour exercer au forfait jours, le salarié doit appartenir à l'une des catégories éligibles à ce dispositif :
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les cadres autonomes dans l'organisation de leur emploi du temps ;
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les salariés non cadres disposant d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur travail.
Prévoir des mécanismes de contrôle et de suivi
La validité de la convention repose également sur la mise en place d'outils de suivi effectif. L'employeur doit être en mesure de contrôler les jours travaillés. Il peut pour cela utiliser un logiciel RH de suivi du temps comme OCTIME, grâce auquel il pourra éditer un document récapitulatif. Ce suivi permet de vérifier le respect des temps de repos et d'alerter en cas de charge de travail excessive.
En l'absence de l'une de ces conditions, la convention de forfait jours peut être invalidée par les tribunaux, entraînant l'application du régime de droit commun avec décompte horaire et paiement des heures supplémentaires.
Une organisation du travail flexible
Le forfait jours redéfinit la relation des cadres à leur emploi du temps. En s'affranchissant du décompte horaire traditionnel, ce dispositif permet une gestion du temps basée sur le nombre de jours travaillés annuellement plutôt que sur un horaire quotidien fixe.
L'autonomie au cœur du forfait jours
Les cadres sous forfait jours peuvent organiser leurs journées de travail librement. Cette indépendance dans la gestion du temps permet d'adapter les horaires aux contraintes professionnelles et aux rythmes personnels. Concrètement, ils ont la possibilité de commencer plus tôt ou plus tard, de faire des pauses plus longues si nécessaire, ou encore de répartir différemment la charge de travail selon les jours. Le cadre peut ainsi concentrer ses efforts sur des périodes de forte activité, puis alléger sa présence lors des phases moins intenses.
Les secteurs privilégiant cette organisation
Certains domaines d'activité tirent particulièrement profit de cette organisation flexible. Dans le conseil et les services aux entreprises, les cadres peuvent ajuster leur présence aux besoins des clients. Le secteur informatique, avec ses projets à échéances variables, bénéficie également de cette souplesse organisationnelle.
Les fonctions de direction et d'encadrement intermédiaire s'accommodent parfaitement du forfait jours, car leurs responsabilités nécessitent souvent une disponibilité adaptable plutôt qu'une présence à heures fixes.
Équilibre vie professionnelle et personnelle
Le forfait jours peut favoriser un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Cette organisation peut réduire le stress lié aux contraintes horaires strictes, notamment pour les cadres confrontés aux aléas des transports en commun ou aux embouteillages.
Malgré ses avantages, cette flexibilité n'est pas sans contraintes. Puisque les horaires du cadre ne sont pas limitées, ses journées peuvent devenir excessivement longues. Il peut aussi rencontrer des difficultés à déconnecter. La frontière entre vie professionnelle et personnelle peut s'estomper.
Rémunération et RTT sous le forfait jours
La rémunération sous forfait jours présente des spécificités importantes à comprendre tant pour l'employeur que pour le salarié, notamment en matière de compensation financière et de jours de repos.
La rémunération du forfait jours doit être à la hauteur des responsabilités et de l'autonomie accordées au cadre. Le salaire doit donc être proportionnel aux sujétions imposées et comprendre une majoration par rapport au salaire d'un cadre aux 35 heures. Cette majoration n'est pas fixée légalement mais peut refléter l'engagement supplémentaire demandé.
Si le salaire est manifestement sans rapport avec ces contraintes, le salarié peut demander une indemnité calculée selon le préjudice subi.
Calcul des jours de RTT en forfait jour
Les jours de RTT pour un cadre au forfait jours se calculent selon la formule suivante :
365 jours - nombre de jours travaillés (selon convention) - samedis et dimanches - jours de congés payés - jours fériés chômés
Sur un forfait de 218 jours travaillés par an, on obtient :
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365 jours dans l'année ;
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104 jours de week-ends (52 semaines × 2 jours) ;
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25 jours de congés payés ;
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9 jours fériés tombant sur des jours ouvrés ;
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218 jours de travail prévus dans la convention.
Le calcul donne: 365 - 104 - 25 - 9 - 218 = 9 jours de RTT
La convention ou l'accord collectif peut prévoir la possibilité pour le salarié de renoncer à une partie de ses jours de repos, qui entraîne alors une majoration de salaire qui ne peut être inférieure à 10%. Elle doit faire l'objet d'un accord écrit entre l'employeur et le salarié. Le nombre total de jours travaillés ne peut toutefois dépasser le plafond fixé par l'accord collectif ou, à défaut, la limite légale de 235 jours par an.
Gestion des absences et impact sur la rémunération
En cas d'absence, la retenue sur salaire se calcule proportionnellement au nombre de jours d'absence par rapport au nombre total de jours travaillés dans l'année. Pour un cadre avec 218 jours travaillés, chaque jour d'absence représente 1/218e du salaire annuel.
Un logiciel de gestion du temps peut aider à automatiser ces calculs complexes et leur impact sur la rémunération des cadres.
Temps de travail et charges supplémentaires
La liberté des cadres dans leur gestion du temps de travail lorsqu'ils sont au forfait jours s'accompagne de questions importantes concernant la gestion de la charge de travail et la compensation des heures supplémentaires.
La charge de travail sous le régime du forfait jours
Les cadres au forfait jours ne sont pas soumis aux 35 heures hebdomadaires ni aux limitations quotidiennes de 10 heures de travail. Leur temps de travail est calculé en jours sur l'année, généralement entre 214 et 218 jours. Cette particularité peut conduire à des journées de travail très longues sans que cela ne soit formellement comptabilisé comme des heures supplémentaires.
Pour autant, l'employeur conserve une obligation de veiller à une charge de travail raisonnable afin de protéger la santé de son salarié. Celle-ci peut être mesurée par le biais d'entretiens périodiques entre le cadre et son supérieur hiérarchique qui peuvent porter sur l'organisation du travail, l'articulation entre vie professionnelle et personnelle, ainsi que la rémunération.
Les heures supplémentaires sont-elles possibles en forfait jours ?
Techniquement, le concept d'heures supplémentaires n'existe pas dans le régime du forfait jours puisque le temps de travail est décompté en jours et non en heures. Cependant, deux situations peuvent donner lieu à une compensation :
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Le dépassement du nombre de jours travaillés prévu dans la convention de forfait ;
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Le travail effectué lors de jours normalement non travaillés (week-ends, jours fériés).
Dans ces cas, les jours supplémentaires travaillés doivent faire l'objet d'une majoration d'au moins 10%, conformément à l'article L.3121-59 du Code du travail. Cette majoration peut prendre la forme d'une compensation financière ou d'un repos compensateur, selon les dispositions prévues dans l'accord collectif.
Protection de la santé des cadres
Pour protéger la santé des cadres au forfait jours, les accords collectifs doivent prévoir des garanties telles que le respect des temps de repos quotidien (11 heures consécutives) et hebdomadaire (35 heures consécutives), même pour les cadres au forfait jours. Les outils numériques de gestion du temps, comme ceux proposés par le Groupe Octime, permettent à un cadre de surveiller les jours travaillés. Ils peuvent servir de base pour aider le cadre à identifier les périodes de travail et celles de repos.
L'utilisation d'outils de planification et de gestion du temps peut également contribuer à maintenir une charge de travail équilibrée.
Les informations partagées dans cet article sont fournies à titre informatif et ne se substituent pas à un conseil juridique adapté à chaque situation.